On a trouvé une femme dans la mer baltique, elle était remplie de petits œufs, ainsi commence et se termine le récit graphique d’Elena Tognoli.
Entre-temps, cette femme aura effleuré notre monde et y aura déposé son goût pour les mots et les questions ; mais aussi sa complexité et son souhait de liberté.
Femme-mirage, elle questionne notre monde, dans lequel elle cherche sa place, parmi les humains, dans la nature. À sa manière, elle nous informe de l’état du monde. Femme-trouvée, décortiquée, objectifiée, elle ne se laisse cependant pas réduire aux attributs qu’on lui appose ; malgré les tentatives de la définir selon son apparence, son âge ou ce qu’elle a dans le ventre, elle reste insaisissable et échappe aux cases.
Femme-matrice au sein de cette mer-mère, elle interroge la féminité, la maternité, et plus largement la filiation. Femme-plurielle, elle semble être le tout et la partie.
Femme-univers, elle dépose ses mots au creux du récit. En elle, gravitent les pensées des mères du monde ; pensées-questions, pensées polyphoniques, pensées suspendues. Et quand les mots viennent à manquer, les dessins prennent le relais avec leur densité et leur bleu profond.
Ni déesse, ni sirène, cette femme-nageuse dépose son petit tas d’œufs sur la plage. Ils éclosent en mots et par là nous adviennent. Qu’en ferons-nous?
Mater Baltica nous tend un miroir, sans jugement ni réponse. À ceux-là, elle préfère la plongée en profondeur.
Elena Tognoli propose un voyage dans un univers qu’elle maîtrise parfaitement. Ses dessins s’accordent au récit, le prolongent, l’accélèrent et emmènent le lecteur dans un monde flottant où perdre pied serait un préalable. Dessins et écriture s’entremêlent pour tisser un récit onirique fluide comme le sable, profond comme la mer.
Les éditions Esperluète accompagnent ici une première publication d'Elena Tognoli et remercient Eloisa Del Giudice pour la traduction du texte.