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Paul André

1941 - 2008

Paul André a été professeur de Lettres, d'abord en Tunisie, pays qui l'a fortement marqué, puis à Tournai. En 1977, il publie des poèmes chez Louis Musin (Du pays alezan), ainsi que des nouvelles (Il est permis de rêver) qui reçoivent le prix Charles Plisnier.

Trois autres recueils complètent sa bibliographie : C'est, paru en 1995 aux éditions Granit et présenté par Henri Pichette, Marches d'été (1999) chez Clapat, Traque d'Eros (2001), au Taillis Pré, Le petit cri têtu du perce-neige (2005) aux Déjeuners sur l'herbe.

Aux éditions Esperluète, il publie trois textes illustrés par Alain Winance : d'Ambleteuse et d'elle, au plus près (2004), A bas bruit, les instants (2007) et Nocturnes (au jour le jour) (2001).

 

Le temps de l’hommage:

Françoise Lison-Leroy

Le décès de Paul André suscite de nombreux témoignages. Ceux-ci disent avec force la présence emblématique de l’écrivain au cœur de sa région.

Universelle, la poésie de Paul André rassemble de nombreux lecteurs mais aussi ceux qui, comme lui, affirment leurs racines avec ferveur. Bien plus loin que l’Escaut, mille fleuves traversent des paysages qui attisent chaque regard. En français et en picard, l’écrivain a célébré le pays d’ici en humaniste, très près des gens et de leurs élans.

Rien à voir avec un régionalisme frileux, puisque Paul avait uneconscience aiguë d’être de quelque part et d’y vivre en harmonie avec le reste du monde. Très tôt, à Bléharies, le professeur de français, fils d’un médecin de campagne, fut une référence en matière de ruralité. « Faut demander à Paulo », répondaient les anciens du village à la jeune Nicole Devreese. Alors animatrice à la Maison de la culture, elle allait devenir son épouse. 

Les premiers ouvrages de Paul André ont été publiés par les éditions bruxelloises Louis Musin, dont le directeur fut l’auteur du livre « Retour à la grande Picardie ».

C’était dans l’effervescence des années 70, l’époque du vaste mouvement culturel et social qui unissait auteurs, chanteurs et récitants autour des « Picards comme vous et moi ». Soirées littéraires à «La Mauvaise Herbe», prémices de l’écologie régionale («A8, mais non !»), participation aux projets d’envergure de la Maison de la culture, mise sur pied d’un atelier de langue picarde…

C’est Paul André qui, alors membre du conseil culturel dirigé par Odon Boucq, lança l’idée du thème « La pierre », source d’une remarquable synergie qui aboutit il y a peu au spectacle-événement « Bleue », aux Fours à Chaux. L’artisan des mots, excellent conteur, poète et nouvelliste, avait un humour bien à lui, tout en finesse et en facéties langagières.

Il a rejoint ses amis Jean-Pierre Hennebo, Pascal Van Moer, Paul Mahieu, Francis Couvreur, qui ont donné au picard ses lettres de noblesse.

Ceux d’aujourd’hui poursuivent le travail de recherche et d’animation avec Bruno Delmotte. Les nombreux poètes qui ont côtoyé Paul André n’oublieront pas cette voix singulière qui épinglait « à bas bruit, les instants ».

De jeunes artistes, comme Guillaume Ledent et Benoît Chantry, lui sont reconnaissants pour la collaboration fraternelle qu’il a apportée à leurs projets.

Une belle page de l’histoire culturelle de notre région est tournée, elle est écrite pour toujours.

 

 

C’était un rassembleur. Témoins d’une belle présence au cœur d’une région aimée, des proches de Paul André disent le grand homme que fut l’écrivain.

 

Alain Winance, Tournai (plasticien, coauteur de plusieurs ouvrages)

Dans les années 70, j’ai participé avec lui au projet Graveurs-Poètes, une initiative de la Maison de la culture. Nous nous connaissions à peine et avions beaucoup de points communs. Sa poésie part du réel pour le transcender. Paul était un grand marcheur. Les mots étaient pour lui des pas. À Ambleteuse, j’ai refait, textes en main, le chemin qu’il avait parcouru. Il m’a appris à regarder autrement les sentiers, les nuages, le ciel.

Il m’a récemment confié un manuscrit intitulé «Nocturnes». Pressentait-il le soir de son existence ?

 

 

Daniel Barbez, Tournai (chanteur, conteur)

Autour de nous, les amis en cercle écoutaient religieusement jusqu’à la dernière vibration de la dernière corde. Alors Paul – il avait appris à ménager les silences et à jouer de sa voix – alors Paul enchaînait. «Au noir quart d’heure, elle était là, à se chauffer les pieds contre l’étuve ; à marmonner des histoires de chiens et de loups qui courent sur les chemins d’écluse…» L’émotion était palpable. Nous ne faisions plus qu’un. Impossible de démêler la chanson du poème. Au-dessus de sa tête, je voyais s’ouvrir un grand pays de labours, de labeurs, de femmes et d’hommes.