[presse] Détonation
"Attentive aux bruissements des microperceptions, des microémotions, Dominique Loreau agence de manière souveraine et poétique une fiction qui explore la scène des affects, de l’ambivalence des pulsions, du clair-obscur des désirs. L’avant-drame, le climax de l’agression, de la détonation et la construction d’un après dessinent, sous une guise délivrée du religieux, l’articulation de l’innocence, de la chute et du salut."
Véronique Bergen (Le Carnet et les Instants).
Fédération Interdiocésaine des Bibliothécaires et des Bibliothèques catholiques
Artiste aux multiples talents et compétences, l’autrice bruxelloise Dominique Loreau est à la fois cinéaste, photographe et maître de conférences à l’ULB. Avec Détonation, elle nous livre un roman palpitant aux allures de thriller psychologique, servi par son art avéré du scénario et de la description visuelle. En soixante pages seulement, l’autrice nous transporte de manière immersive dans l’univers envoûtant du Brésil où une jeune fille découvre le pays en compagnie de ses parents en vue de s’y installer pour ses études. Ce voyage, qui se présente initialement comme une expérience enthousiasmante de découverte culturelle, révèle peu à peu une dimension inquiétante à travers la confrontation avec la réalité complexe, et toujours subtilement suggérée, d’un pays en proie à la récession et à l’insécurité. Une tension qui culmine dans les deux derniers tiers du récit où l’agression de cette famille par deux jeunes délinquants tient habilement le lecteur en haleine jusqu’au coup de feu décisif !
Dominique Loreau nous livre, avec une finesse d’analyse remarquable, une trame narrative intense basée sur sa propre expérience d’une agression armée au Brésil au cours d’un voyage familial. Dix ans après les faits, elle s’empare de cette matière vécue pour disséquer et explorer avec virtuosité les réactions et pensées des protagonistes confrontés à une menace inattendue et à l’imminence du drame, offrant ainsi une réflexion profonde sur le choc du réel et les mécanismes de survie. En parallèle de cette écriture très cinématographique, et sans doute thérapeutique, se dévoile une captivante série de photographies en noir et blanc, prises sur le vif par l’autrice au cours de son voyage et de l’agression elle-même, qui ponctuent le texte de leur force évocatrice. Bien au-delà du simple récit de voyage, Détonation se révèle une enthousiasmante déflagration littéraire par sa dimension réflexive et la vitalité de son écriture.
La Librairie des ondes
Marie-Eve Stevenne, RCF radio, octobre 2023
www.rcf.fr/culture/la-librairie-des-ondes
Onde de choc
Christiane Sistac, Mare Nostrum, juin 2023
"Ce bel objet discret est si mince qu’on le perd dans la pile à lire… Mais son titre résonne, brutal, et sur la première de couverture, la photographie intrigue et distille déjà le malaise. De dos, une femme qu’on devine jeune s’avance dans un décor incertain : une plage déserte et un massif touffu sous un ciel encombré de nuages… Un thriller ?
Le texte est aéré, se déroule en brefs paragraphes et frôle parfois, souvent même, une disposition typographique de poème en prose… Quelques très belles photos en noir et blanc brossent un cadre et invitent à des hypothèses de lecture. Elles sont de l’auteure, sauf la dernière, une énigmatique et insolite spirale, œuvre de l’ethnopsychiatre Philippe Woitchik.
La maison d’édition Esperluète a largement ouvert ses collections à Dominique Loreau, écrivaine et cinéaste belge (ne pas la confondre avec son homonyme française, essayiste, qui vit au Japon et s’est fait connaître par son très remarqué L’Art de la légèreté paru en 2005 chez Laffont). De 2004 à 2020, six textes, tous illustrés par des plasticiens renommés, ont été publiés sous ce signe typographique qui se veut symbole du lien entre l’écrivain et l’artiste, entre le livre et son lecteur. Détonation est le septième. Une trame simple : un couple de touristes européens lambda accompagne leur fille dans ses premiers pas sur le sol du pays où elle a choisi d’étudier la sociologie pendant plusieurs mois. Tout d’abord, il y a l’excitation mais aussi plusieurs sujets d’inquiétude dans ce Brésil aux brûlants contrastes, dont la langue leur est étrangère. Pourtant, peu à peu, les paysages, les rencontres chaleureuses ou pittoresques, les musiques et la tiédeur de la mer abolissent à la fois la peur et le sentiment d’étrangeté. Et cette impression de faire corps avec le pays d’accueil les fait perdre toute prudence… La rencontre de deux gamins affamés de drogue va faire basculer leur vie.
En physique, dans une détonation, on perçoit l’onde de choc puis l’onde de combustion. La seconde naît de la première et l’entretient. Dans ce court roman, on peut repérer deux parties bien distinctes et tout aussi intimement liées. Elles sont marquées par le passage appuyé du pronom “ils” au pronom “elle”. Pour que l’onde de choc se produise, il faut que les conditions soient réunies. Dans un roman, au regard de l’absolue injustice sociale, peu de choses suffisent à la déclencher : un vieil appareil argentique, une pochette suspecte contenant d’inestimables trésors, les cheveux blonds d’une fille du nord… L’instant se fige et les conséquences s’inscrivent indélébiles dans le temps, en lente combustion des idéalismes ou en prise de conscience d’une insoutenable réalité.
Plongez dans Détonation, un voyage palpitant au cœur du Brésil, où le dépaysement se heurte à l’injustice sociale. Entre idéalisme et réalité brutale, l’auteure tisse un suspense haletant qui vous tiendra en haleine jusqu’à la dernière page."
article à lire ici
De la prose poétique ciselée
La Viduité, juin 2023
"Comment raconter une agression traumatique ? L’altération de l’ailleurs, l’épreuve de l’exotisme, sont ainsi capturés avec une sensibilité photographique, une manière de retenue très visuelle. Dans ce très bref roman, une soixante de pages, Dominique Loreau travaille l’image dans tous les sens : de la prose poétique ciselée, incarnée et fragile, des belles photographies dont le noir et blanc joue sur le détail, la profondeur de champ pour donner à voir autre chose qu’une vérification, qu’une simple illustration, qu’une façon de fictionnaliser un ressenti personnel. Détonation parvient à dire un pays, le rapport coupable et dominateur que sera toujours le tourisme.
On entend ici et là que la littérature est morte, qu’elle ne parvient plus à produire de grandes créations, d’immortelles et intimidants chef-d’œuvre. On oublie ainsi de se réjouir du fait que le temps est peut-être à la modestie, à la fragmentation, à l’interrogation de notre présence au monde sans certitude, sans assurée colonisation de l’espace. Peut-être aurons-nous aussi (mais pas uniquement) de petits romans, des textes ramassés, incisifs, illustrant sans doute l’émouvant du work in progress, la continuation d’une démarche de connaissance et de doutes. C’est beau aussi. L’intrigue de détour est d’une enfantine simplicité : des parents accompagnent leur fille qui a choisi de faire durant quelques mois ses études au Brésil. « Pays d’excès et de démesure. Avec des ciels pareils. » Le vrai intérêt de ce livre est la façon dont il se confronte avec le mythe, dont il redonne sens au voyage. Épreuve des images préconçues. La consommation de masse que l’on croit épuisée, ici, dans nos pays frappés par le capitalisme tardif, expirant. Le métissage qui n’est pas là, la pauvreté dès que l’on s’écarte des chemins balisés, des lieux sécurisés pour les riches touristes. On pressent le paradoxe pointé en douce par Dominique Loreau : aujourd’hui le tourisme a besoin d’exotisme, de singularité, d’entrer en contact avec les autochtones.
Tout cela est si bizarre, irréel, nostalgique, triste et beau et moche et si lointain. Juste des images et des sons d’un monde qu’elle reconnaît, mais dont elle ne fait plus partie. Fini.
Les sensations dont on peut rendre compte sont-elles uniquement éperdues ? Sans rien y connaître, en étant tout juste capable (sans doute est-ce l’essentiel) de dire que ces photos « m’ont parlées », on pense que c’est le rôle de la photo. Figer l’instant qui ne reviendra qu’en hantise, le capturer dès lors pour ce qu’il n’est pas, autrement que dont il a été ressenti. Si on se hasardait à qualifier ses photos dont l’autrice accompagne son texte, nous dirions oniriques. Un flottement, la certitude sans doute aussi d’avoir été là sans rien y comprendre. Une vision déjà estompée. La famille part sur une île, elle subit une agression. « Ce serait ça, la réalité ? » ne cesse de s’interroger Détonation, le fait qu’on ne puisse pas s’en prendre à eux, qu’eux sont du bon côté, soutiennent pauvres et opprimées, n’ont rien d’autres qu’une pochette à donner à ceux qui les menacent. Ensuite, cette détonation ouvre à un trou noir qui, comme le dit un beau passage versifié de ce roman, dévore tout. Chacun essaie de composer avec sa version des faits.
Dominique Loreau parvient, dans une écriture que l’on peut presque trop facilement qualifier de photographique, à reconstituer, décomposer, l’instant, comment chacun va le vivre, et, plus subtilement, à distance, comment composer avec. Pourtant, insidieusement, d’autres détonations se substitueront à celle traumatique. La fille est perdue, affronte le pays dans une cognitive incompréhension. Soudain, dans une manifestation, à l’instar de Sao Paulo de Xavier Baert, la vie paraît un instant pouvoir reprendre. « Cris de révolte, élans communs, banderoles colorés. » Insistons une dernière fois, cette dans ce genre de notations elliptiques que brillent Détonation : la pureté de la sensation avant sa dissipation."
Roman hors champ
Les notes, juin 2023
"Une jeune femme s'apprête à devenir étudiante en sociologie au Brésil. Ses parents, médecin et artiste, l'accompagnent le temps de son installation. Suite aux conseils sur place, le trio reste sur ses gardes les premiers jours de leur exploration commune. Le temps passe, la vigilance s'atténue, puis tout bascule au cours d'une excursion sur une île, d'une détonation…
Ponctué de quelques photographies en noir et blanc, ce très court roman bénéficie d'un rythme efficace et millimétré. Les photographies donnent à sentir des instants pris sur le vif à l'unisson avec les flots de pensées des personnages qui s'entrelacent au cours de leur expérience inédite. Les états d'âme et les actions sont resserrées à la manière de cadrages cinématographiques qui laissent transparaître les émotions qui affluent. Beaucoup de finesse dans la nuance des cas de conscience mais aussi dans ce qui relève d'une confrontation à l'Autre, à l'aune de sa culture et de sa classe sociale. Captivant !"
Un sentiment d'étrangeté au monde
Interview de Dominique Loreau au micro de David Courier, émission Le Courrier Recommandé, BX1, 14 juin 2023
"David Courier : - Ça veut dire quoi être dans un pays lointain, perdre ses repères, perdre ses réflexes…?
Dominique Loreau : - J’aime bien me décentrer et m’immerger dans une culture qui n’est pas la mienne. J’ai toujours aimé découvrir d’autres cultures, voir les choses d’un autre point de vue.
- Pourquoi, pour la découverte, la sensation d’être un peu ailleurs, sortir de sa zone de confort?
- Non c’est un vrai intérêt, de découverte, mais aussi j’ai toujours eu un sentiment d’étrangeté dans mon monde, même ici à Bruxelles, de ne jamais être à ma place, et donc je suis toujours allée ailleurs, et finalement j’avais le même sentiment d’étrangeté, et je voyais Bruxelles avec un autre regard.
(…)
- C’est ça qui est formidable à travers votre écriture, ils s’aventurent, ils prennent des risques, et à un moment donné ils vont prendre un trop grand risque. L’écriture devient moins lascive, le rythme s’accélère, parce qu’il va y avoir cette fameuse détonation, qui va bouleverser l’équilibre des trois personnages. Comment avez-vous travaillé l’écriture pour en arriver à ce point-là?
- Au départ, j’ai essayé de raconter ce qui m’est arrivé, simplement. Puis je m’en suis éloignée. Il faut dire que c’est arrivé il y a 10 ans, donc j’ai eu 10 ans pour réécrire les choses, il fallait du recul, il fallait que des individus deviennent des personnages de roman, que je puisse me mettre dans chaque personnage, décrire leur intériorité. Et donc c’est tout ça qui petit à petit a pris corps.
J’aime bien écrire avec du recul."
"Un livre étonnant, beau et intéressant"
Interview de Dominique Loreau, au micro de Charlotte Dekoker, émission Weekend Première sur la RTBF, juin 2023
"C’est un pays émergent, déclaré comme émergent, ça commence à aller vraiment bien, mais petit à petit on se rend compte que ça commence à battre de l’aile, il ya des signaux qui montrent qu’il y a une récession qui va commencer. On allait dans des endroits qui pouvaient potentiellement être dangereux.
Pendant l’agression, à la fois on a l’impression que c’est pas vrai, que c’est un cauchemar, qu’on n’est pas dans la réalité, que c’est carnaval.
Des hommes masqués il y en avait partout.
On n’y croit pas et puis après on finit par y croire quand même.
Il y a toutes ces impressions de malentendus.
Ça doit pas être nous, en plus on n’a rien sur nous.
Je dis que c’est un malentendu, mais en même temps, c’est logique que ce soit nous qu’ils attaquent, ce sont toujours les gens les plus proches qui se font attaquer ou enlever.
Des gamins paumés, des gamins des rues qui ont vu des films sur les truands et qui ont voulu faire la même chose.
Tout se passe par les regards, très cinématographique. On est traversés de beaucoup d’images en vous lisant.
Ces photos, je trouvais qu’elles étaient importantes, parce qu’elles montrent plutôt une atmosphère du moment. Ce sont des lieux vides, des personnages vus de dos. Tandis que le texte, étant donné que je l’ai travaillé, j’ai pris une grande distance pour réfléchir à tout ça, pour me mettre à la place de tous les personnages, y compris les truands. J’aimais bien le rapport entre les photos pris sur le vif et le texte littéraire plus travaillé."
interview à écouter ici
Cinématographie intérieure
Nikola Delescluse Willaert, émission Paludes, Radio Campus Lille, juin 2023
"C’est là que se produit cet épisode, à savoir le surgissement de deux individus armés qui vont précipiter non seulement les pensées des personnages, ce qui se passe dans la tête des trois individus, la mère, le père et la jeune fille, s’entremêlant bien évidemment à la fois l’interrogation sur ce qui est en train de se dérouler sous leurs yeux, le sentiment qu’ils sont pris au piège d’une situation absurde, que ces jeunes gens font fausse route, que ce n’est pas eux qu’ils devraient détrousser, que les Robins des bois en question se sont trompés de cible ; et en même temps ce sentiment vital, cette envie de survivre, qui va les pousser les uns et les autres dans des retranchements individuels.
Et en même temps je parle de précipiter parce qu’on a l’impression effectivement d’une réaction chimique au moment où se produit cet événement, il se passe dans le texte une transformation intérieure qui interroge ce que cette violence apporte aux différents protagonistes et ce qu’elle révèle à la fois d’un pays qu’on est en train de découvrir, ce Brésil qui est à la fois un pays fascinant et attirant pour tout ce qu’il apporte d’exotisme et de nouveautés, de changements radicaux pour ces trois personnes, et en même temps ce qu’il couve en lui même de dangers, de menaces et de possibilités d’y perdre la vie. Ca donne un texte qui est travaillé par cette cinématographie intérieure, qui avance avec à la fois beaucoup de rapidité et en maintenant ce suspense, ce coté thriller qui vous entraîne irrésistiblement vers la fin sans jamais perdre de vue cette mécanique intérieure que la détonation qui doit surgir à un moment ou à un autre des révolvers va évidemment enclencher. "
chronique à écouter ici
Musique du large et déflagration
Véronique Bergen, Le Carnet et les Instants, 19 mai 2023
"Rythmé par des photos en noir et blanc prises par l’autrice, le récit Détonation explore les tessitures du visible, les inflexions du réel, des regards, des gestes, des mouvements de pensée, les mutations météorologiques des émotions. Qu’est-ce qui se joue dans nos rencontres avec l’altérité, avec un pays lointain, avec des paysages maritimes, des êtres chargés d’histoire ? Cinéaste, photographe, écrivain, Dominique Loreau dresse un roman qui dévoile la complexité de la réalité, des rapports que nous nouons avec elle, avec les autres, avec nous-mêmes.
Accompagnée par ses parents, une jeune fille débarque au Brésil afin d’y étudier la sociologie. Beauté sauvage de l’océan, favelas s’étendant à perte de vue, enclaves de résidences fortifiées d’hyper luxe au milieu des bidonvilles, ségrégation, métissage, omniprésence de la musique et de la danse, violence de la société, combines et trafics en tout genre des laissés-pour-compte, d’une jeunesse ravagée par le crack… le décor dans lequel baignent les trois protagonistes dont nous ne connaîtrons jamais le nom est planté. Loin de souscrire au célèbre incipit sur lequel Claude Lévi-Strauss ouvre Tristes tropiques — « je hais les voyages et les explorateurs » —, la jeune femme est avide de dépaysement, de vivre ses rêves, de vérifier les mythes auxquels elle croit. Le mythe qui l’attire au Brésil est celui d’une terre de « métissage réussi » dans un « pays d’excès et de démesure ». Peu après son arrivée, au fil des échanges avec des habitants, les coutures du mythe craquent.
Dans ce pays, on n’a pas encore digéré la colonisation, l’esclavage et la dictature militaire. La violence et le mépris se transmettent de génération en génération, mais on les a toujours travestis derrière un masque de fête et de convivialité. Mais tu verras — et il s’adresse à la fille — quand tu iras à Rio ; il n’y a presque aucun noir ni indien dans les universités. Tant qu’on ne veut rien voir, rien ne changera…
Dominique Loreau pratique l’art des glissandos, de l’irruption tout à la fois progressive et brutale, annoncée et imprévisible de l’événement, du drame. La confrontation des touristes avec un pays en pleine mutation, ravagé par la déforestation, où les inégalités socio-économiques explosent, s’opère sous une multiplicité d’impressions, d’observations. La description poétique de l’ivresse sensorielle procurée par les plages, par le mouvement hypnotique de la mer laisse poindre des signes avant-coureurs de la rencontre avec un grain de réel qui a pour nom la conjonction de deux espaces-temps incompatibles, celui des touristes qui symbolisent la richesse, l’oppression, celui de deux jeunes truands en manque de crack. Les teintes des mots, du ciel, les signes de la nature se déportent dans des zones de risque, d’inquiétante menace. La confrontation avec la mort, l’instinct de survie, le mélange de lâcheté et de courage qui s’emparent des parents et de la fille menacés par les revolvers de deux jeunes gens déchirent le récit au même titre qu’ils ébranlent les assises psychiques et existentielles de ce trio qui fait l’épreuve d’une discordance entre le mythe et la réalité.
Pendant ce temps, le père se fait braquer à distance par l’autre gamin qui, arrogant et décidé, hurle comme un démon (…)
Et peut-être aussi, au-delà de ça, dans une obscure pulsion héritée d’une longue histoire immémoriale, vouloir prouver — et se prouver — qu’il peut terroriser des blancs, qu’il peut venger ses ancêtres nés des viols de masse et laissés dans la misère à l’abolition de l’esclavage.
Mais à cet instant précis, ses intentions sont sans doute plus triviales.
Percutés par le réel (« le réel, c’est quand on se cogne » disait Lacan), les personnages sont soumis à un point de fracture qui, à des degrés divers, lézarde leur plan mental, met à mal les certitudes existentielles sur lesquelles ils faisaient fond. Attentive aux bruissements des microperceptions, des microémotions, Dominique Loreau agence de manière souveraine et poétique une fiction qui explore la scène des affects, de l’ambivalence des pulsions, du clair-obscur des désirs. L’avant-drame, le climax de l’agression, de la détonation et la construction d’un après dessinent, sous une guise délivrée du religieux, l’articulation de l’innocence, de la chute et du salut."
"Un plaisir fou"
Josyane Savigneau, radio RCJ, chronique "Les Livres", mai 2023
"J'ai pris un plaisir fou et il faut lire ce Détonation de Dominique Loreau, parce que ce n'est pas du tout une petite aventure au Brésil, c'est un livre qui va beaucoup plus loin."
Chronique à réécouter ici